SNBC 3 : une stratégie bas-carbone recentrée sur l’électrification et l’industrie
- Huglo Lepage Avocats

- il y a 23 heures
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Lise-Hélène Gras, Juriste documentaliste
Le ministère de la Transition écologique a présenté en décembre la troisième Stratégie nationale bas-carbone (SNBC 3) qui fixe le cap vers la transition écologique de la France jusqu’en 2050. Cette feuille de route ambitionne de répondre à la fois à l’urgence climatique et au contexte de « backlash écologique ». Plus opérationnelle que les versions précédentes, elle ne se limite plus à la fixation des budgets carbone par secteur : elle détaille également les leviers technologiques, industriels et économiques jugés les plus efficaces pour atteindre la neutralité carbone.
La SNBC 3 fixe évidemment des budgets carbone sectoriels jusqu’en 2040. Les respecter implique une baisse moyenne des émissions de gaz à effet de serre de 5 % par an, sans recours aux crédits carbone internationaux, alors que la France n’a réduit ses émissions que de 1,8 % en 2024. Pour combler cet écart, la stratégie privilégie les leviers les plus efficaces, offrant le meilleur ratio d’euros investis par tonnes de CO2 évitées.
Dans ce cadre, l’électrification constitue l’axe central de la stratégie, qui se veut à 80 % comme une stratégie électrique. S’agissant des transports, elle vise 66 % de véhicules électriques dans les ventes de voitures neuves d’ici à 2030. Pour ce qui est du bâtiment, elle prévoit l’installation de 8,8 millions de pompes à chaleur dans le résidentiel. L’isolation progresse de façon plus mesurée avec 700 000 rénovations de logements par an en moyenne, dont 250 000 rénovations d’ampleur, un niveau considéré comme le maximum soutenable pour la filière.
Ce choix technologique est assumé. Selon le ministère, les véhicules électriques et les pompes à chaleur sont aujourd’hui disponibles, rentables et capables de générer rapidement des réductions d’émissions. La SNBC 3 fait en revanche preuve de prudence sur les scénarios de sobriété, jugés plus complexes à déployer à grande échelle.
La stratégie introduit pour la première fois des objectifs en empreinte carbone. Elle intègre désormais les émissions liées aux importations, qui s’élevaient en 2024 à 563 Mt CO2. Cette empreinte devra être réduite de 38% à 43 % d’ici à 2030, puis de 71% à 79 % en 2050 par rapport à 2010. Pour y parvenir, elle mise sur l’écoconception, la durabilité des produits, le réemploi, le recyclage, la sobriété matière et l’usage de matériaux bas-carbone, sans pour autant chiffrer précisément la contribution de chaque levier.
Dans l’industrie, la stratégie prolonge les trajectoires de décarbonation déjà engagées, notamment sur les 50 sites les plus émetteurs, sans rupture majeure. Le secteur des déchets devra réduire ses émissions de 28 % en 2030 et de 55 % en 2050, principalement via la réduction des volumes de déchets, la baisse de l’enfouissement et la valorisation matière.
L’agriculture conserve un statut particulier : la stratégie vise une baisse de 28 % des émissions du secteur en 2030 et de 54 % en 2050 par rapport à 1990, sans aborder frontalement la question de la consommation de viande. Les efforts portent surtout sur la réduction des engrais azotés, des importations de soja, du gaspillage alimentaire et le développement de l’agriculture bio, en soulignant le caractère « incompressible » d’une partie des émissions agricoles.
Enfin, la stratégie revoit à la baisse le rôle du puits de carbone des terres et forêts, dont la capacité d’absorption est en déclin depuis 2013. Elle vise une stabilisation autour de -25 Mt de CO2 en 2030, tout en réduisant la pression sur la biomasse, désormais réservée en priorité aux usages non énergétiques, industriels et aux réseaux de chaleur.
La SNBC 3 doit encore être soumise à consultation avant son adoption par décret au printemps 2026.
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