Le rapport du Climate Litigation Network retrace 10 ans de contentieux climatique
- Huglo Lepage Avocats

- il y a 3 jours
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Lise-Hélène Gras, Juriste documentaliste
Dix ans après l’Accord de Paris et la décision fondatrice « Urgenda », l’année 2025 marque l’aboutissement d’une décennie durant laquelle le contentieux climatique a profondément structuré un cadre juridique de la protection du climat.
Dans un rapport « Laying the Foundations for our shared future », le Climate Litigation Network analyse comment cette multiplication des recours a permis de bâtir une véritable architecture juridique, désormais incontournable dans la gouvernance climatique. En 2025, plusieurs décisions majeures illustrent ce tournant.
La Cour internationale de justice a tout d’abord rendu un avis consultatif historique affirmant que les États ont l’obligation de protéger leurs citoyens contre les effets du changement climatique. La Cour interaméricaine des droits de l’Homme a d’ailleurs, par un avis consultatif rendu quelques mois plus tard, confirmé cette position.
Parallèlement, les juridictions nationales ont renforcé la responsabilité climatique des entreprises : l’affaire « RWE » en Allemagne a reconnu leur rôle dans la réparation des dommages climatiques, tandis que l’affaire « ENI » en Italie ouvre la voie à des poursuites contre les entreprises qui ne respectent pas leurs obligations en matière de réduction d’émissions.
Le rapport montre que cette dynamique s’est construite sur une décennie d’actions engagées par les citoyens les plus exposés, en réponse directe à l'inaction des gouvernements de mettre en place des mécanismes pour protéger la population du changement climatique. Parmi les personnes les plus exposées se trouvent les jeunes (affaire « Duarte Agostinho et autres »), les femmes âgées (affaire « Verein Klimaseniorinnen Schweiz »), les peuples autochtones ou les personnes handicapées.
Cette mobilisation s’explique notamment par la faiblesse structurelle de l’Accord de Paris qui, bien que posant des obligations en matière d’atténuation et d’adaptation, laisse aux États le soin de définir leurs contributions nationales (CDN) et a par conséquent ouvert la voie aux juridictions nationales au contrôle des mesures des Etats en matière de climat.
Les contentieux ont produit un « effet boule de neige », à titre d’exemple les juges se seront référé cette année à une quinzaine de décisions climatiques rendues dans les juridictions nationales d’autres pays pour renforcer leurs propres motivations. Trois axes juridiques se sont ainsi consolidés : celui de l’obligation des entreprises de réduire leurs émissions, l'obligation des Etats de limiter leur soutien à la production de combustibles fossiles et la responsabilité des grands émetteurs pour les pertes et dommages climatiques.
L’avis de la CIJ reprends les fondements consolidés au fil de la décennie qui imposent aux gouvernements de prévenir les risques climatiques, de contribuer à l’objectif de limitation du réchauffement climat 1,5 °C, de protéger les générations futures en adoptant des plans climatiques équitables et réalisables et de démontrer la cohérence de leurs politiques pour atteindre les objectifs climatiques.
Enfin, les décisions climatiques influencent largement les régulateurs et les investisseurs : un réseau de 148 banques centrales et autorités de surveillance considère désormais le contentieux climatique comme un risque financier significatif.
Pour la décennie à venir, le défi sera de traduire cette architecture juridique en transformations systémiques capables de réduire effectivement les émissions et d’engager la responsabilité pour les dommages désormais inévitables.
Pour lire le rapport, cliquez ICI
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