La commission européenne présente un plan d’action controversé pour l’industrie chimique européenne
- Huglo Lepage Avocats
- 10 juil.
- 2 min de lecture
Lise-Hélène Gras, Juriste documentaliste
Le 8 juillet, la Commission européenne a présenté, dans le cadre du 6 e omnibus de
simplification sectoriel qu’elle a adopté en mai dernier, un plan d’action pour l’industrie
chimique, visant à restaurer la compétitivité du secteur dans un contexte de pression
géopolitique et économique. Si ce paquet entend répondre à des défis industriels réels tels que
la flambée des coûts énergétiques, la complexité réglementaire, la concurrence étrangère, il
suscite de vives inquiétudes sur le plan du respect du droit de l’Union en matière de santé et
d’environnement.
Le plan s’articule autour de quatre axes principaux : la création d’une alliance pour les
produits chimiques critiques, pour réduire les dépendances stratégiques, notamment sur des
molécules clés comme le méthanol ; la réduction des coûts énergétiques par l’extension des
régimes d’aides d’État et l’accélération des procédures d’autorisation industrielle ; le soutien à
la demande par l’intégration de critères de contenu européen durable dans les marchés publics
et privés ; et la simplification règlementaire, attendue par l’industrie chimique, notamment via
une réforme de l’ECHA et un allègement du règlement REACH.
S'agissant tout d'abord de la simplification, qui concerne principalement les règles
d'étiquetage des produits chimiques dangereux, la réglementation de l'UE relative aux
cosmétiques et les exigences en matière d’information relatives à l'enregistrement des
fertilisants.
Cette orientation soulève des critiques de fond : alléger les exigences du règlement REACH,
en réduisant la charge administrative pesant sur les entreprises, pourrait en effet conduire à un
abaissement des exigences de protection de la santé et de l’environnement, en contradiction
avec les objectifs de l’article 191 du TFUE.
Certains eurodéputés dénoncent une remise en cause de la législation sur les substances
cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques (CMR), y compris dans des produits cosmétiques,
ce qui irait à l’encontre de la jurisprudence constante de la CJUE (CJUE, 22 nov. 2012, aff. C-
558/11). Les ONG pointent également l’absence de conditionnalité environnementale et
sociale aux aides publiques, contrevenant potentiellement aux exigences du règlement sur les
subventions d’État et au Pacte vert pour l’Europe. La révision des règles d’étiquetage des
substances dangereuses, récemment adoptées, pourrait de surcroît être perçue comme une
régression normative incompatible avec le principe de non-régression en droit de l’UE.
Concernant les PFAS, la Commission promet une approche nouvelle approche. Les PFAS
seraient interdits dans les usages domestiques (ustensiles de cuisine, textiles), mais seraient
maintenus dans les secteurs stratégique, tels que ceux de la défense et de la transition,
énergétique, en l’absence de solutions alternatives. Cette approche soulève des risques de
fragmentation réglementaire et pourrait être difficilement conciliable avec les projets de
restriction globale en cours d’examen à l’ECHA.
Si ce plan semble poursuivre une logique de compromis industriel, il pourrait en revanche se
heurter au droit de l’UE et à la jurisprudence de la Cour, en particulier si les allégements
réglementaires venaient à compromettre les objectifs de protection de la santé humaine et de
l’environnement fixés par les traités européens.
Pour lire le communiqué de presse de la Commission, cliquez ICI
Pour lire le plan d’action, cliquez ICI
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