La CADA refuse que le secret industriel et commercial soit opposé à une demande de communication de documents concernant les effets sur l’environnement et les risques de pollution d’une entreprise nucléaire
La commission d’accès aux documents administratifs (CADA) vient de rendre un avis (n°20173363) très intéressant. Une association, partie dans la procédure concernant Fessenheim avait demandé la communication d’un certain nombre de documents à l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) concernant en particulier des courriers d’EDF relatifs aux conséquences du percement du radier et aux fuites de corium, au fonctionnement des dispositifs de secours en cas de perte de source froide ou encore relatif au bilan des prescriptions relatives à la poursuite de l’exploitation. Les documents avaient été transmis pour partie et très largement caviardés. L’association avait saisi la CADA de cette situation.
Par son avis en date du 11 Janvier 2018, la CADA leur a donné raison. Elle a, en effet, considéré que les conditions définies aux articles L. 124-1 à L. 124-6 et L. 125-10 du code l’environnement « visent à assurer un degré élevé de transparence et à permettre au public d’apprécier si et dans quelle mesure il est ou pourrait être exposé à des rayonnements ionisants, elles doivent être interprétées comme incluant non seulement les informations sur la nature, la quantité, la composition et le caractère nocif des émissions, mais également sur les risques d’émissions ainsi que sur les mesures prises pour les prévenir ou en limiter les effets ». Puis, la commission rappelle le conseil n° 20093465 du 5 novembre 2009, dans lequel elle avait décidé que « la communication des informations relatives à des émissions dans l’environnement ne peut être refusée que si elle porte atteinte à la conduite de la politique extérieure de la France, à la sécurité publique ou à la défense nationale, au déroulement des procédures juridictionnelles ou à la recherche d’infractions pouvant donner lieu à des sanctions pénales, ou à des droits de propriété intellectuelle ». Mais, le secret en matière commerciale et industrielle ne saurait faire obstacle à la communication de telles informations.
En conséquence, l’ASN ayant invoqué le refus de la communication des documents demandés au titre de la préservation du secret en matière industrielle et commerciale, la commission a décidé que ces occultations n’étaient pas légalement justifiées et que la communication des documents devait l’être « dans une version uniquement occultée des mentions ayant trait à la sécurité ».
Cet avis est très intéressant et important non seulement pour le secteur nucléaire particulièrement sensible, mais également de manière plus générale pour tous les refus de communication ou les communications imparfaites d’entreprises qui s’abriteraient derrière le secret industriel et commercial pour refuser de communiquer des documents relatifs aux effets sur l’environnement de leur mode de fonctionnement.
Corinne LEPAGE
Avocate à la Cour
SAS HUGLO LEPAGE AVOCATS